mardi 20 mai 2008

La cabane dans le bois

Et si le Vide était la vie. Vous savez, le vide comme dans tombez dans le vide, ou comme dans faire le vide. Le vide comme dans sans filet, oser, plonger, risquer...vivre.

Je me souviens, il y avait cette petite cabane dans un arbre, lorsque j'étais jeune. Oh, pas un palace ni un chef d'œuvre d'architecture, mais elle dégageait pour moi quelque chose de beaucoup plus fort que tout château. Je l'avais construite au fil des jours, sous le regard approbateur du soleil qui chaque matin daignait se lever pour, j'en avais l'impression, superviser mon grand chantier!

Il y avait une planche, épave du plus grand bateau pirate du Pacifique, puis une autre, réputé incraquable puisque cadeau d'un grand tsar. Je me souviens aussi de ma corde que je croyais bien tissé à même la crinière d'une licorne. Mes clous et vis dont le métal était résultat d'une concoctation minutieuse d'un grand alchimiste! Que dire de mon télescope qui pouvait scruter jusqu'au bout du monde et avec lequel il me semblait pouvoir observer toutes les étoiles de la galaxie! J'avais cette corne qui avait sans le moindre doute été collecté à même le corps d'un chef de troupeau de mammouth et avec lequel je pouvais appeler à des milles à la ronde!

Je me souviens aussi de la hauteur et des planches que j'avais mises en guise d'échelle à même l'arbre. Chaque matin, toujours cette même peur et ce même vertige à l'idée de monter dans ce qui me semblait être la plus haute des tours! J'étais impressionné comme seul un enfant peut l'être, j'étais intimidé et apeuré. Et si je tombais? Et si une planche craquait? Et si... ?

Mais voilà qu'au loin, le soleil me souriait, me disait: ''Vas-y, allez jeune insolent!'', et encore, toujours, je me risquais et ne faisais ni une ni deux des dangers dont j'oubliais jusqu'à l'existence bien rapidement. Comment penser aux hauteurs affolantes et risques épeurants lorsqu'on plongeait dans un univers aussi riche, pur et cristallin que celui de l'imaginaire? J'étais absorbé par ces quêtes à remplir, ces missions rocambolesques aux allures titanesques qui mobilisaient toutes les parcelles de mon être de par leurs exquises saveurs qui collectaient l'entière attention de tous mes sens. Les journées étaient suspendues et j'étais à des centaines de kilomètres de chez moi! Je rêvais et vivait et ce, sans filet.

Puis voilà qu'aux étés succèdent les hivers et lentement ma tête s'approche du toit pour finalement faire contact avec de dernier et peu à peu j'en suis venu qu'à oublier ces journées, à oublier leurs sens et leurs richesses, leur vigueur qui faisait de moi, petit homme, le plus grand de la race, l'espace d'un instant. On en vient qu'à rire de soi, oublier qu'à une époque, c'était bien loin d'être ridicule. Au contraire, c'était capital! Et lentement, un peu plus chaque été, la cabane se délabrait jusqu'à ce que je n'y aille plus jamais.

Ô bien sur parfois j'y repense. Je reprends espoir en ce monde fabuleux, ce royaume des contes merveilleux, de l'imaginaire infini et de l'innocence d’immaculée pureté. Le temps d'un printemps, d'un amour, j'y repense bien à ce palace. Je me surprends même à en parler, à confier cet univers et ainsi vivre sans filet. Mais voilà, les chutes sont brutales et lentement on s'éloigne de ce monde, de nos rêves, de qui nous sommes...

10 commentaires:

Anonyme a dit…

T'es incroyable! Je continue de le dire. Tu fais chanter les mots et... tu m'enchantes!

Le Tapageur Silencieux a dit…

@maryse: Merci encore, je fais mon possible!

KattyKane a dit…

C'est fous comment vieillir change notre perception de la vie...

Des plaisirs qui nous semblaient tellement essentiels devienent désuets. Et on perds notre capacité à vivre d'imaginaire...

Souvent je me surprends à m'ennuyer des moments d'insouciance... ça me semble bien loin tout ça...

Tu me rends nostalgique mon cher...

;)

Drew a dit…

MA-GNI-FI-QUE!

L'instant de ce billet, j'ai retrouvé cette magie qui nous rends le monde si beau. Qui nous accorde cette importance et qui nous éloigne du numéro qui nous est trop souvent attribué...

Merci beaucoup de ce partage!

Le Tapageur Silencieux a dit…

@kattykane: Avec le temps s'évapore cette enfantine innocence, cette pure naïveté qui faisait de ce monde quelque chose d'infiniment magnifique. C'est vrai que ça rend nostalgique d'y repenser.

@drew: C'est bon de se rappeler cette magie enfantine.

Anonyme a dit…

Je suis retournée un brin dans mon enfance où le sous-bois se transformait en cour royale, où les arbres me servaient de montagnes et où un roche devenaient mon Everest.

Je suis peinée de constater que les enfants d'aujourd'hui jouent peu dans l'imaginaire. Le lundi, lorsque mes élèves me racontent leur week end, ce sont des consoles de jeux qui monopolisent leur temps et leur cerveau. Il n'y a plus de place dans leur quotidien d'enfant pour le rêve et l'imaginaire. Ils sont blancs comme des draps les pauvres.

Si tu n'y vois pas d'inconvénient, je leur lirais bien ton billet. Il me semble qu'il serait très à propos dans ce que j'essaie de leur expliquer: l'importance de jouer dehors et de s'inventer un monde au lieu de "pitonner".

Le Tapageur Silencieux a dit…

@voix haute: C'est vrai que les jeunes jouent moins dehors. Moi aussi d'ailleurs, je devient un peu plus végétatif plus le temps passe, je devrais remédier à ça bien vite avec l'été qui arrive.

Je pense qu'il faut rendre l'extérieur attrayant pour les jeunes, les plonger aussi dans un univers imaginatif, les inviter à la création. Il n'en ressortira que du bien. Pour ce qui est de lire ce billet, j'en serais honoré si ça peut servir à quelque chose.

Le chômeur a dit…

C'est fou comme ça paraît long de disons 12 ans à 18 ans... mais après ça... ça passe en coup de vent. Puis rapidement la nostalgie s'installe.

Anonyme a dit…

@Maryse: Il t'enchante et je suis convaincu qu'il pourrait te faire chanter aussi...

rosi a dit…

Je vous remercie énormément pour toutes vos propositions sur ce site. Vos partages sont très intéressants et fort enrichissants. Félicitations à vous.

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